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The storyteller is the story

By Jennifer Clement. This Story belongs to the Mexican Centre

Speech. “Good evening and thank you all for joining us tonight.  Here you’ve heard about the peril journalists face in Mexico and the problems that contribute to a total collapse of the rule of law. For Mexicans today it is hard to interpret the words around us.  In these sad and crazy times we read newspapers where messages from the drug traffickers have been published, right beside the real news or in the classified section where narco messages appear in the broken thumb language of text messaging. We read the writing on walls and on the enormous white cotton sheets covered with messages that have appeared hanging from bridges and buildings.  In news coverage we read letters that were pinned to dead bodies.  We also try to decipher words actually carved into the skin of victims as if it were paper – – across a belly, down an arm, we read a skin graffiti. 

Weeks ago, after the assassination of photojournalist Luis Carlos Santiago, some narco graffiti appeared on a wall in Juarez signed by the La Linea Cartel that stated: Nosotros no matamos periodistas: we do not kill journalists.  It was a highly unusual declaration.  I logged on to the Blogdelnarco to see the response to this new graffiti. Blogdelnarco is an internet site that appeared about 6 months ago and is covering stories that the mainstream media are feeling threatened to stay away from.  It is a place where all sides seem to communicate – – drug traffickers, law enforcement, and ordinary citizens.  This controversial site contains everything from violent videos of torture and decapitations to a section on Mexican narco corridos and even narco jokes.

Another stated that it is not the alphabet that kills: bullets kill.

Regarding the graffiti that claimed Nosotros no matamos periodistas written on a white wall in red spray paint to look like blood, I found 392 posts.  They were not about the message itself or the violence against journalists but were 392 vitriolic and sarcastic comments about the abominable spelling and poor syntax of this graffiti.  One blogger said he was ashamed by the narcos’ lack of education and, he continued, even our narcos are Third World.  Another stated that it is not the alphabet that kills: bullets kill. One person wrote emphatically that she preferred to read the messages and graffiti from the rival cartel because at least they knew how to spell.  After I read over more than one hundred outraged comments a sheepish and mortified “spelling apology” was posted, which might have been placed there by the cartel. To this expression of regret one blogger answered: You criminals are so good at killing you’ve even killed the Spanish language.  

Yes, these are sad, and crazy, times for Mexico.

So, to stand here in your company is deeply moving for us who are living this madness. At this moment it is so important for Mexicans to feel that the rest of the world cares about this land that is a victim of corruption, poverty, US drug consumption and immoral gun selling and a land where the storyteller has become the story.  

But we cannot think that this, that seems so specific, is Mexico.  No.  This is the world we are all living in.

I would like to thank the American PEN Center, and especially Larry Siems and Elizabeth Weinstein, The Committee to Protect Journalists and the Knight Foundation for their support and participation.  I also would like to thank my colleagues in PEN Mexico Aline Davidoff and  Brandel France de Bravo.  And thank you, all of you, for spending an evening in solidarity with journalists, both Mexican and foreign correspondents, who risk their lives in Mexico.”

Le Conteur est l’histoire

Par Jennifer Clement. Ce texte appartient au Centre mexicain.

Discours. “Bonsoir et merci à tous de vous être joints à nous ce soir.  Aujourd’hui, vous avez pu entendre parler des dangers auxquels les journalistes sont confrontés au Mexique et des problèmes qui contribuent à l’effondrement total de l’État de droit. Pour les Mexicains d’aujourd’hui, il est difficile d’interpréter les mots qui nous entourent.  En ces temps tristes et fous, nous lisons des journaux dans lesquels les messages des trafiquants de drogue sont publiés juste à côté des vraies nouvelles, ou dans la section des petites annonces, où les messages des narcotrafiquants apparaissent dans le langage morcelé des SMS. Nous lisons ce qui est écrit sur les murs et sur les énormes draps de coton blancs couverts de messages qui sont apparus, suspendus aux ponts et aux bâtiments.  Dans les reportages, nous lisons des lettres qui ont été épinglées sur des cadavres.  Nous essayons également de déchiffrer les mots qui ont été littéralement gravés dans la peau des victimes, comme s’il s’agissait de papier – sur un ventre, le long d’un bras, nous lisons un graffiti de peau. 

Il y a quelques semaines, après l’assassinat du photojournaliste Luis Carlos Santiago, un « narco-graffiti » est apparu sur un mur à Juarez, signé par le cartel La Linea, qui déclarait : Nosotros no matamos periodistas : nous, nous ne tuons pas les journalistes.  C’était une déclaration très inhabituelle.  Je me suis connectée à Blogdelnarco pour voir les réactions que ce nouveau graffiti avait suscitées. Blogdelnarco est un site internet qui a vu le jour il y a environ six mois et qui couvre des sujets dont les médias traditionnels préfèrent, par crainte, se tenir à l’écart.  C’est un lieu où toutes les parties semblent communiquer – les trafiquants de drogue, les forces de l’ordre et les citoyens ordinaires.  Ce site controversé contient de tout, des vidéos violentes de torture et de décapitations à une section sur les narcocorridos, les « ballades de la drogue » mexicaines, et même des « narco-blagues ».

‘Ce n’est pas l’alphabet qui tue, ce sont les balles’.

En ce qui concerne le graffiti qui prétendait que Nosotros no matamos periodistas, écrit sur un mur blanc avec de la peinture en bombe de couleur rouge pour ressembler à du sang, j’ai trouvé 392 posts.  Ils ne portaient pas sur le message lui-même ni sur la violence contre les journalistes ; il s’agissait de 392 commentaires virulents et sarcastiques sur l’abominable orthographe et la mauvaise syntaxe de ce graffiti.  L’un des blogueurs a dit qu’il avait honte du manque d’éducation des narcotrafiquants et a ajouté que « même nos narcotrafiquants sont du Tiers Monde ».  Un autre a déclaré : « Ce n’est pas l’alphabet qui tue, ce sont les balles. » Une personne a écrit, de manière catégorique, qu’elle préférait lire les messages et les graffitis du cartel rival parce qu’au moins ils maîtrisaient l’orthographe.  Après avoir lu plus d’une centaine de commentaires indignés, j’ai constaté qu’une « excuse orthographique » penaude et mortifiée, qui aurait pu être placée là par le cartel, avait été postée. À cette expression de regrets, un blogueur a répondu en ces termes : « Vous, les criminels, vous excellez tellement à tuer que vous avez même tué la langue espagnole. »

Oui, ce sont des temps tristes et fous que vit le Mexique.

Alors le fait d’être ici en votre compagnie est profondément émouvant pour nous qui vivons cette folie. En ce moment, il est tellement important pour les Mexicains de sentir que le reste du monde se soucie de cette terre victime de la corruption, de la pauvreté, de la consommation de drogue aux États-Unis et de la vente immorale d’armes à feu – d’une terre où le conteur est devenu l’histoire.  

Mais il ne faudrait pas considérer que ce que je viens de décrire, et qui semble si spécifique, c’est le Mexique.  Non. C’est le monde dans lequel nous vivons tous.

Je tiens à remercier le Centre PEN américain, et en particulier Larry Siems et Elizabeth Weinstein, le Comité pour la protection des journalistes et la fondation Knight pour leur soutien et leur participation.  Je tiens également à remercier mes collègues du Centre PEN mexicain, Aline Davidoff et Brandel France de Bravo.  Et merci à vous tous d’avoir passé une soirée de solidarité avec les journalistes, correspondants mexicains et étrangers, qui risquent leur vie au Mexique.”

El noticiero es la noticia

Por Jennifer Clement. Este texto pertenece al Centro Mexicano

Discurso. “Buenas noches y gracias a todos por acompañarnos esta noche.  Aquí han oído hablar del peligro que corren los periodistas en México y de los problemas que contribuyen al colapso total del Estado de derecho. A los mexicanos nos resulta actualmente difícil interpretar las palabras que encontramos a nuestro alrededor.  En estos tiempos tristes y locos leemos periódicos donde se publican mensajes de los narcotraficantes, justo al lado de las noticias reales o en la sección de anuncios clasificados, donde aparecen en el particular lenguaje de los mensajes de texto. Leemos pintadas en las paredes y en las enormes sábanas blancas de algodón que aparecen colgadas de puentes y edificios.  En las noticias, leemos cartas que se dejaron clavadas en cadáveres.  También tratamos de descifrar palabras que se grabaron en la propia piel de las víctimas como si fuera papel… leemos grafitis en la piel de un vientre o un brazo. 

Hace semanas, tras el asesinato del fotoperiodista Luis Carlos Santiago, aparecieron en Juárez pintadas firmadas por el cártel de La Línea que decían: Nosotros no matamos periodistas. Fue una declaración muy inusual. Me conecté a Blogdelnarco para ver la respuesta a este nuevo grafiti. Blogdelnarco es un sitio de internet que apareció hace unos seis meses para cubrir historias de las que los principales medios de comunicación se mantienen alejados porque se sienten amenazados.  Es un lugar donde todas las partes parecen comunicarse: los traficantes de drogas, la policía y los ciudadanos corrientes. Este controvertido sitio contiene de todo, desde violentos vídeos de torturas y decapitaciones hasta una sección de narcocorridos mexicanos e incluso chistes de narcos.

Otro afirmó que lo que mata no es el alfabeto, sino las balas.

Con respecto a la pintada que decía «Nosotros no matamos periodistas», escrita en una pared blanca con un espray de pintura roja para que pareciera sangre, encontré 392 entradas. No hablaban del mensaje en sí o de la violencia contra los periodistas, sino que eran 392 comentarios vitriólicos y sarcásticos sobre la abominable ortografía y pobre sintaxis de la pintada. Un bloguero dijo estar avergonzado por la falta de educación de los narcos, para continuar diciendo que incluso nuestros narcos son del tercer mundo. Otro afirmó que lo que mata no es el alfabeto, sino las balas. Una persona escribió enfáticamente que prefería leer los mensajes y pintadas del cártel rival porque al menos sabían ortografía.  Después de más de un centenar de comentarios indignados, se publicó una vergonzosa y abochornada «disculpa ortográfica», que podría haber sido colocada allí por el cártel. A esta expresión de disculpas respondió un bloguero: “Ustedes los criminales son tan buenos matando que hasta han matado el idioma español”.  

Sí, son tiempos tristes y locos para México.

Por eso, quienes estamos viviendo esta locura nos sentimos profundamente conmovidos por estar aquí en su compañía. En este momento es muy importante para los mexicanos sentir que el resto del mundo se preocupa por esta tierra que es víctima de la corrupción y la pobreza, y del consumo de drogas y la inmoral venta de armas de Estados Unidos… una tierra donde el noticiero se ha convertido en la noticia.  

Pero no podemos pensar que esto, que parece tan específico, sea México. No. Este es el mundo en el que todos vivimos.

Me gustaría dar las gracias al Centro PEN Estadounidense, y especialmente a Larry Siems y Elizabeth Weinstein, al Comité para la Protección de los Periodistas y a la Fundación Knight por su apoyo y participación. También me gustaría dar las gracias a mis colegas de PEN México, Aline Davidoff y Brandel France de Bravo. Y gracias a todos ustedes por compartir esta velada de solidaridad con los periodistas, tanto mexicanos como corresponsales extranjeros, que arriesgan sus vidas en México.”